Je te vois sur ce banc, repliée sur ton livre. Pourtant tu ne lis pas . Tu regardes ta montre . Le temps semble ne plus passer pour toi. Tu voudrais pousser les aiguilles. Tu attends, tu l'attends.
Moi je n'attend personne. Je suis venu me poser là, au bord du grand bassin, sans raison ou, alors, simplement, pour prendre le temps de n'avoir rien à faire.
Regarder les pigeons, les poissons, les boulistes et, maintenant, attendre avec toi que je ne connais pas.
Dans tes longs cheveux bruns que le vent exaspère, tu cache l'inquiétude. Je vois juste ton oeil, sentinelle furtive, entre deux mèches folles. Je suis si loin de toi mais comme je te sens ! Je sais que tu as peur d'être là pour personne ou alors que le sort t'amène le malheur.
Tes frissons me rejoignent et viennent me glacer. A mon tour, moi aussi, j'ai peur du vide, de l'absence. Je voudrais te rejoindre et m'asseoir près de toi.
Rester là sans rien dire. Surtout ne rien te dire. Ne pas être mal pris. Je voudrais te souffler " qui est ce qui te fais ça, qui te meurtrit le coeur ?"
Et puis le téléphone qui sonne dans ta poche. Je n'entend pas tes mots. je te vois t'affaisser. Je te vois te défaire. Et le temps est parti , il te reste le vide. Et moi je suis au bord de te tendre la main que tu ne voudras pas . Tu ne veux plus rien , plus personne.
Ta main est retombée sur le livre, tes yeux s'en vont chercher à ne rien regarder.
Déjà tu ne t'aimes plus.
Je ne connais de toi que ta lourde tristesse. Je la sens sur mon dos. Je le connais ce gouffre qui t'aspire, il est profond, profond et terriblement noir. Personne pour t'entendre, te montrer le chemin. Personne, juste toi, ton miroir et tes larmes.
Tu passe devant moi, je regarde mes pieds. Je vois ton long manteau effrayer les pigeons. Un enfant te sourit et te tend son ballon, il a vu sur ta joue quelque chose qui coule.
- Ta maman est partie ?
- Non, il avait un match.
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