La cerise était sur le gateau.
Un vrai gros gâteau blanc, surmonté d'une cerise confite, trônait au milieu de la grande table, toute blanche aussi. Derrière la table, derrière le gteau blanc, une mariée toute blanche avec les yeux tout rouges.
Deux enfants le menton posé sur la table, les mains derrière le dos, regardent le spectacle.
- Elle pleure, Emilie.
- Mais non, elle est trop comtente que son grand frère lui a fait le discours.
- Sa maman aussi elle pleure.
- Elle est trop contente que sa fille elle se marie.
- Son papa, y pleure pas
- oh, lui , il a dit, "le Bernard c'est un con".
Elle a bien les yeux rouges, Emilie. Son père lui a dit, en montant vers le coeur, "Comprends pas que tu épouses ce con".
Depuis elle a froid, elle sourit mais elle a froid. Ses chaussures la serrent et cette satanée jarretière lui scie la cuisse.
- Monte la plus haut, il faut qu'ils en aient pour leurs sous, disait sa tante.
Debout derrière son gâteau, Emilie regarde la salle.
Elle voit son mari (ben oui, maintenant, c'est comme ça qu'il faut dire) qui chante avec ses copains du foot. On y parle de Nantes et de Montaigue.
Elle voit son père avec les anciens d'Algérie. Il a oté sa cravate et montre sa blessure en parlant de "félouses".
Elle voit sa soeur qui fait des "manières" à l'ainé des Picard. Ils boivent du mousseux et fument des Pall Mall.
Elle voit sa mère assise le bouquet à la main. Sa mère qui la regarde avec les yeux tout rouges.
- Oh non, maman, pas toi, arrête de me regarder avec cet air désespéré.
- Et toi, tu t'ais vu ?
- Mais moi j'ai froid, puis je suis fatiguée et puis Bernard m'agace. On dirait qu'il fait tout pour énerver papa.
- Oh ton père, quand il est avec ses copains, il ne voit plus rien. Regarde, il ne t'a même pas fait danser.
Les enfants en ont assez d'attendre le dessert. Il ont poussé leurs doigt dans la Crème chantilly et se sont disputé la cerise.
L'accordéon d'Albert nous grince "Destiné".
Emilie a froid dans sa robe de reine.
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