La guinguette

 

Si demain tu venais me toucher à l'épaule comme pour en chasser une mouche, un cheveu, je crois que je saurais reconnaitre tes doigts sur ma veste en velour.

- Mais, quand tu me dis ça, tu me dis que tu m'aimes ?

- Oui.

- Alors pourquoi tout ça ? et pas "je t'aime" simplement ?

- Parce que ça suffit pas. D'autres l'ont déja dit. Et puis ça te fait rire.Tu téloignes en criant, "toi, je te vois venir"

Les autres sont venus comme ça, avec leur quatre phrases, te prendre du plaisir et ne rien te donner.

Tu les as vu venir et croire à leur conquête. Tu as appris à en rire en essuyant tes yeux.

Elle écoute, sourit, repousse ses cheveux. Le garçon, silencieux, regarde ce sourire. Elle perd son regard dans le bois de bouleaux. Elle met du silence, il en fait du soupçon. On fête le dimanche à la table voisine. La guinguette est bruissante sous le soleil de Mai. Lui n'entend rien, il attend dans son silence à elle. Il n'a plus de mots ou, alors tellement.

Elle dit :

- Je sais plus quoi dire, moi. T'es tellement serieux quand tu me parles que j'en ai presque peur. On dirai que tu joues ta vie à chaque phrases. Je t'assure, tu fais presque peur. Pour moi la vie, c'est simple, c'est pas prise de tête. C'est :"je t'aime, tu m'aimes et basta" On fait le chemin ensemble tant que ça colle et puis, salut. Tu sais, l'amour , le tien, il existe même plus dans les livres.

Il dit :

Je sais, tout ça, je l'ai déja entendu. Je suis un affreux romantique. Tu as vu ? je t'ai même fait le coup de la guinguette au printemps avec le muguet, les robes à fleur, la Marne. Tu veux le tour en barque ? Ah, désolé, il n'y a pas d'accordéon. 

Je ne sais pas aimer "pousse bouton", aimer "fast love". Il faut que j'approche que ça batte fort dans la poitrine. Il faut que je dise "vous" et lentement laisser le "tu" venir au bout d'une caresse. Il faut que je fleurise de mots et de fleurs. J'aime dire l'amour autant que de le faire.

Se laisser aller à la caresse paresseuse et à la paresse caresseuse.

- C'est vrai que t'es barge. Tu fous vraiment la trouille.