Robert ne sait pas le langage des fleurs. Il ne sait pas les emails, les mots doux glissés dans les poches. Robert sait les silences gênés, les bouts de phrases timides. Robert s'excuse d'abord, comme s'il se mouvait dans un monde trop petit pour son mètre quatre vingt, ses cent dix kilos et ses quarante ans.
« Mon pauvre petit », lui dit régulièrement sa mère en le toisant du haut de son mètre cinquante.
Quand les voisins ont eu leur grand malheur, il a posé un bouquet à la grille. Elle est venue le remercier en traversant le jardin. Un sourire mouillé, un merci étouffé, une main fine et blanche qui effleure la sienne. Il n'a pas su lui dire l'orage dans sa tête.
Quelques mois plus tard, parce qu'il pleuvait très fort, il les a ramenées, toutes les deux de l'école. La fillette le regardait presque effrayée.
- Elle fait du bruit, ton auto.
- Juliette, s'il te plait.
- Non, laissez la, elle à raison, c'est pas une limousine ma camionnette.
- Papa, il avait une belle lui.
- Juliette, arrête.
Le bruit du moteur avait repris toute la place jusqu'à la maison.
- Merci beaucoup monsieur Robert.
- Non, Robert tout court s'il vous plait.
- D'accord, alors, merci Robert. A bientôt.
- A bientôt.
- Tu veux la voir l'auto de mon papa ? maman dit qu'elle est pleine de souvenirs.
- Juliette, n'embête pas Robert.
Le soir alors que la pluie avait cessée, il était allé mettre « un coup de pelle » dans le caniveau. Elle lui avait souri en fermant ses volets. Ce soir là la fatigue ne le décidait pas à aller se coucher. Il sirotait un dernier verre de vin appuyé au balcon.
- Mon pauvre petit, a murmuré la mère en éteignant la télé.
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