Nous prenions le taxi pour partir en vacances. C'était avant la 403. Nous partions pour deux mois dans une maison de famille à une cinquantaine de kilomètres. Le chauffeur venait de bonne heure pour caler les bagages et les cartons. Mon père scientifique et rationnel, l'aidait de la voix et du geste. Ma mère, à sa fenêtre, supervisait le tout. Nous étions cinq à partir, mes parents, mes deux soeur et moi. Les animaux restaient à la maison.
La voiture était un long véhicule commercial à trois rang de sièges. mon père s'asseyait à coté du chauffeur, au milieu, ma mère et les filles, à l'arrière, moi tout seul entouré de cartons. La conversation allait d'une banalité à l'autre. Mon père, peu bavard, ponctuait de soupirs et hochements les vérités première du taxiteur. Ma mère surveillait du coin de l'oeil mes soeurs tourmentées par les routes cévenoles.
Dans mes cartons, dans ma "cabane", je suis déjà là haut. Il y a Christian et son énorme mère qui crie à la fenêtre de ne pas s'éloigner et jean-pierre, ramasseur de cailloux pour qui tout est précieux. Enfin il y a Chantal avec sa mobylette. C'est une belle fille qui nous fait un peu peur. Elle, rien ne l'effraie. Elle a les cheveux courts, un t-t-shirt et un jean. Sous le léger coton il y a ses seins qui dansent. De petits seins pointus d'adolescente qu'elle semble ignorer autant qu'ils nous subjuguent.
Chantal, c'est notre Himalaya. Chacun à notre tour nous tentons notre chance. A nos assauts, fait de compliments et de ronds de jambes, elle répond comme un garçon répondrait à une tape virile dans le dos. C'est notre première convoitise, notre première discorde. Le soir dans notre lit, notre premier rêve, nos premiers gestes honteux.
Au fond de la voiture, caché par les cartons j'organise mon plan. Cette année, j'en suis sûr, Chantal m'emmènera sur son porte bagage. Nous irons dans le bois au dessus du village et là, elle sera la fille, je serai le garçon. Je ne sais pas comment mais j'en tremble déjà j'apprendrai les baisers, j'apprendrai les caresses. Je reviendrai le soir des cloches dans la tête. Mes soeurs me moquerons, mon père sourira. Moi je ne dirai rien conservant le mystère. Je l'aurai cette année, ma première explosion, ma première bourrasque.
La voiture s'arrête devant le grand portail. Je saute par l'arrière bousculant les cartons. Christian est sur la place et me fait des grands signes. Il accourt souriant :
- Tu sais pas la nouvelle ?
- Ben non.
- Chantal est arrivée avec son amoureux.
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