Robert,
Ce soir, en rentrant à l'hôtel, le réceptionniste m'a donné ton message. Ce serait tellement plus simple si tu acceptais d'avoir un portable. Je pourrais te raconter, de vive voix, mes impressions de voyage, passer un petit moment avec toi avant de dormir. Tu dois me trouver bien gamine, quelques fois. Mais, que veux-tu, l'enfance remonte toujours avec le mal de vivre. Je retrouve le besoin de protection, de réassurance.
Pour en revenir à mon voyage, il faut que je t'avoue que je n'ai pas résistée longtemps à l'envie d'aller trainer dans mon ancien quartier. Et, bien sûr, j'y ai rencontré plus de fantômes que de vivants. Beaucoup d'anecdotes me sont revenus, des petits bouts de vie, des flashes, toujours heureux, de ces années avec le père de Juliette. Cela va te paraître surement bizarre mais j'en reviens sereine, comme libérée de je ne sais quoi. J'ai, maintenant, l'impression qu'il fallait que je le fasse pour tourner la page. Pas oublier mais mettre vraiment au passé ce morceau de ma vie.
Voilà ce que j'aurais aimé te dire ce soir au téléphone, enfin dans un téléphone plus discret que celui qui trône chez toi à coté de la télévision. Tu aurais entendu mon émotion, j'aurais entendu la tienne. Je pense que j'aurais, surtout, entendu ton silence, n'est ce pas ?
Je te taquine mais tu es, tout de même, la personne la plus silencieuse de mon entourage. Cela frustre beaucoup quand on a eu la chance de connaître ta conversation.
Robert, je rentre demain. Le séjour ne m'a pas paru long mais ma petite campagne et ses habitants m'ont manqués. J'ai hâte de vous revoir tous les trois, j'ai encore plein de choses à raconter et des choses à te dire. J'ai besoin du coin du feu, des salades de Suzy, des cris de Juliette, de l'odeur de la soupe. Je sais ça fait un peu retour à la nature, à la vraie vie mais tant pis. J'assume.
Je t'embrasse.
C'est la première fois.
C'est bien, les lettres.
Elise
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