Figure-toi mon fils, mon grand, qu’un jour ton père a eu vingt ans. Lui aussi a eu des galères. Des vraies qui font grincer les dents. De celles que l’on cache surtout à ses parents. Quand on se crois au fond du trou où ce qu’on vit n’a plus de goût. Figure-toi mon fils, mon grand, qu’un jour il a eu quarante ans, quand l’amour à foutu le camp et l’a balancé seul en déroute comme un crevard au bord des routes. Figure-toi mon fils, mon grand, qu’arrivé à ses cinquante ans le bonheur avait refleuri. Pas dans un pot mais un jardin avec des yeux et des câlins. Il faisait chaud dans sa prairie. Figure-toi mon fils, mon grand que lorsque viennent les soixante, on s’apprête pour la descente. Pas question de laisser glisser. Faisant semblant de s’excuser, on cherche à attraper le pompon et à jouer du mirliton. Figure-toi, mon fils, mon grand qu’à l’aube des soixante-dix, on n’compte plus de dix en dix bien qu’on espère croquer la pomme même s’il nous manque quelques dents.

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